Encore un livre de Delphine de Vigan dévoré en une après-midi...Cette fois, l'identification a opéré non pas sur l'idée de la rencontre mais sur l'enfance...
L'histoire :
Lou Bertignac a 13 ans, un QI de 160 et des questions plein la tête. Les yeux grand ouverts, elle observe les gens, collectionne les mots et dévore les encyclopédies.
Enfant unique d'une famille en déséquilibre, entre une mère brisée et un père champion de la bonne humeur feinte, dans l'obscurité d'un appartement dont les rideaux restent tirés, Lou invente des théories pour apprivoiser le monde.
A la gare d’Austerlitz, elle rencontre No, une jeune fille SDF, privée d’amour, rebelle, sauvage. No, dont l’errance et la solitude questionnent le monde.
Des hommes et des femmes dorment dans la rue, font la queue pour un repas chaud, marchent pour ne pas mourir de froid. « Les choses sont ce qu'elles sont ». Voilà ce dont il faudrait se contenter pour expliquer la violence qui nous entoure. Ce qu'il faudrait admettre. Mais Lou voudrait que les choses soient autrement. Que la terre change de sens, que la réalité ressemble aux affiches du métro, que chacun trouve sa place. Alors elle décide de sauver No, de lui donner un toit, une famille, se lance dans une expérience de grande envergure menée contre le destin. Envers et contre tous.
A l'école, on parle beaucoup des" enfants en difficulté" mais rarement des "enfants IP", qui le sont peut-être autant mais autrement...
Voilà un extrait du livre que j'ai bien aimé et que j'afficherai à la rentrée au-dessus de mon bureau...
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« Un jour, une psychologue m’a expliqué ce que ça voulait dire, être IP (intellectuellement précoce). « Imagine que tu es une voiture extrêmement moderne, équipée d’un nombre d’options et de fonctionnalités plus important que la plupart des voitures, que tu es plus rapide, plus performante. C’est une grande chance. Mais ce n’est pas si facile. Car personne ne sait exactement le nombre d’options dont tu disposes ni ce qu’elles te permettent de faire. Toi seule peux le savoir. Et puis, la vitesse, c’est dangereux. Parce qu’à huit ans, ce n’est pas pour autant que tu connais le code de la route, ni que tu sais conduire. Il y a beaucoup de choses que tu dois apprendre : à rouler quand il pleut, quand il neige, à regarder les autres voitures, à les respecter, à te reposer quand tu as roulé trop longtemps. C’est ça, devenir une grande personne. »
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« Parler, je n’aime pas trop ça, j’ai toujours l’impression que les mots m’échappent, qu’ils se dérobent, s’éparpillent […], c’est pourquoi j’évite les récits et les discours, je me contente de répondre aux questions que l’on me pose, je garde pour moi l’excédent, l’abondance, ces mots que je multiplie en silence pour approcher la vérité. »
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« Je voudrais seulement être comme les autres, j’envie leur aisance, leurs rires, leurs histoires, je suis sûre qu’ils possèdent quelque chose que je n’ai pas, j’ai longtemps cherché dans le dictionnaire un mot qui dirait la facilité, l’insouciance, la confiance et tout, un mot que je collerais dans mon cahier, en lettres capitales, comme une incantation. »
J'ai été extrêmement sensible à cette description...Je n'ai pas été une "enfant IP", plutôt une hyper sensible...La première de la classe...malgré moi... Et le sentiment aujourd'hui de ne toujours pas être une "grande personne", trop sensible, trop soucieuse, trop silencieuse...Une voix intérieure qui n'en finit jamais de penser...