Séquence émotion
Ce mardi 8 janvier, je suis partie très tôt à l'hôpital, juste un mois après l'opération.
L'angoisse au fond de moi... quels résultats la chirurgienne allait-t-elle encore me donner ? Je l'associe tellement à l'annonce en mai 2012 ( Pour ceux qui l'ont vécue ou qui la vivront un jour, tous les malades sont d'accord pour dire que ce que le milieu médical appelle l'annonce" est le pire des moments de toute l'épreuve. )
Et puis après 1h d'attente, "elle" me reçoit, tout sourire, me souhaite une "bonne année", me dit tout de suite qu'"il n'y a rien à l'analyse, on a tout enlevé ", j'ai du mal à réaliser... J'envisageais depuis quelques jours tous les scénarios, une autre ablation, des métastases, un sursis de vie raccourci encore...
Et puis elle rédige une nième nouvelle prescrition : 30 séances de drainage lymphatique du bras, en plus des 25 séances de radiothérapie à venir... des RV, encore et encore, pas une journée de répit, de repos.
Je passe ensuite chez la coiffeuse de l'IGR.
Je croise dans le couloir la psy que je n'ai pas revue depuis juillet. Elle me dit bonjour avec ce sourire angélique que je déteste. Dans le secret de son bureau, elle a tant provoqué de larmes...
Je sais que les cheveux qui ont repoussé depuis deux mois ne sont pas beaux, "ils contiennent encore du souffre, il faut les raser", me dit la coiffeuse...
Je craque, je pleure. Je me revois 6 mois en arrière, et puis j'accepte parce qu'il le faut.
On tire le rideau devant le miroir, elle me laisse quelques mm, parce qu'elle dit qu'elle voit bien que "je ne suis pas prête, que je ne m'accepte pas, que je dois lâcher prise, que les cheveux repoussent mieux chez les femmes moins angoissées que moi, que je devrai revenir régulièrement pour qu'elle coupe les pointes, "qu' elle me refera pleurer !!!""...
Les larmes aux yeux, je ressors avec une boîte d' ampoules de sérum de ginseng pour activer le cuir chevelu une fois par semaine, pendant 10 semaines. Facture : 40 euros.
Je ressors de l'hôpital, avec toutes mes remises en cause qui ont ressurgi en une matinée.
Ainsi, "je n'aurais toujours pas accepté" ma tête... et la maladie qui va avec... (ah bon, vous en connaissez beaucoup qui acceptent...à moins de ne pas être touchées elles-mêmes !...)
Ainsi je ferais bien de m'appliquer à vivre une année "plus libre, osée et décomplexée" ? (mais qui gagnerait en liberté et en audace à se sentir examiné, observé, manipulé par de nouvelles mains à chaque rendez-vous médical ?)
Ainsi je ne fais pas partie des "fortes"... et je fais juste semblant d'aller bien ? ( parce que je ne passe pas mon temps à me plaindre ou à pleurer...)
Ainsi donc je ne serais pas si "exceptionnelle" et "admirable" que certains me l'ont laissée croire ...
Et puis le soir en rentrant à la maison et en ouvrant mon blog, mon refuge,
je découvre que le "Cabochard" m'a écrit !!
Ou plutôt la mascotte, mon doudou de correspondant, me propose un stage de plongée en septembre ! Je n'ai pas le "profil" mais je pourrais faire partie de l'équipe des éclopés !!
Et j'écoute Bixente Lizarazu qui dit que "la nature ne juge pas, contrairement aux humains".
Et je vois ces accidentés de la vie, de la plus petite au plus vaillant, reprendre confiance en eux, après avoir montré et partagé leurs différences et appris à plonger et à nager seuls.
Alors pour la première fois, hier soir, j'ose enlever devant mon mari le bonnet qui ne m'a pas quittée depuis 6 mois.
Et me remettre sereinement entre ses mains bienveillantes pour un premier massage au ginseng !
ma rentrée, je la ferai en septembre.
J'avais si peur de reprendre un jour, j'envisageais un mi-temps thérapeutique.
Non, je reprendrai, à plein temps, la tête haute et fière de mon expérience, n'en déplaise à ceux qui essaieront de me déstabiliser par leur regard.
Merci encore Veronica, Zazou, Marie, Loula, Béa ...
et à toutes celles qui ne jugent pas parce qu'elles "savent" :
la secrétaire de la Mgen qui m'a montré son sein reconstruit, la jeune femme prothésiste qui m'a parlé tout naturellement parce que sa mère a eu un cancer du sein à 47 ans, Michèle qui partage au quotidien le même parcours de santé, mes amies du cours de gym adaptée qui m'ont toutes embrassée lundi à mon retour, Jean-Marc notre moniteur bienveillant qui m'a félicitée pour mes efforts.
Je n'ai jamais voulu faire de ce blog un témoignage au quotidien de mes doutes, de mes angoisses ou de mes progrès.
Mais aujourd'hui, j'avais envie d'oser.
Oser dire.
Faire, comme Alexandre Jollien, L'éloge de ma faiblesse".
« Il faut soigner son corps pour que l’âme s’y plaise. »
St Vincent de Paul